karoshi 38 : i'm too sexy for my shirt, so sexy it hurts ...

Je dois bien l'avouer, la télévision japonaise ne cesse de me fasciner. Chaque fois que je pense en avoir fait le tour, que je crois avoir tout vu, la voici qui dégaine d'une nouvelle idée loufoque et incroyable qui me laisse pantois. Tenez, pas plus tard que Lundi soir, pas loin de minuit et au détour d'une séance de zapping sur les chaines nipponnes, me voilà en train de regarder (d'un oeil que le sommeil guette) une émission des plus culturelles – Cocorico Kaijô Kasai (Un petit tour dans le dictionnaire, et l'on apprend que cela signifie plus ou moins « Cocorico met le feu à la mer », Cocorico étant le nom du groupe de rigolos qui anime la chose. A défaut de brûler les planches ...). Une émission au concept intriguant – puisqu'il s'agit de faire de l'art. Si si.

Le principe en est assez simple : réaliser un calendrier, avec comme sujet l'un des deux animateurs, Tanaka, un grand échalas dégingandé à l'air vaguement niais et la coiffure résolûment moyennâgeuse. Pour ce modèle de choix, de jeunes et innocentes idols vont affuter leur crayon et se lancer dans une (brêve) carrière artistique, pour réaliser six dessins originaux de monsieur Tanaka dans des situations de saison.

Si le concept de l'émission s'arrêtait là, le résultat serait plutôt compassé et intello, tendance franchement ennuyeux, mais n'oublions pas que nous sommes au Japon, et à la télévision de surcroît. Non content de se faire tirer le portrait, le sieur Tanaka va donc profiter d'une petite pause entre les poses pour se mettre à l'aise, et revenir devant sa dessinatrice aussi nu qu'un ver. Et là, il faut l'avouer, cela devient nettement plus drôle. Car si la qualité des dessins laissait à désirer, les réactions des demoiselles sont véritablement savoureuses.

On se lève d'un bond, on crie, on se réfugie dans un coin, on se met les mains devant le visage pour cacher la vue de cette horrible chose, c'est la panique, alors que le bon Tanaka essaie de s'approcher pour expliquer le pourquoi de son geste, que c'est dans un but artistique (et jamais vulgaire, bien sûr) qu'il se retrouve en tenue d'Adam ... ce qui ne fait que relancer la crise et les cris. La palme revient d'ailleurs à cette américaine hystérique fréquement invitée des talk-shows, blondasse décolorée aux tenues incroyables (pas de doute, madame est daltonienne), qui va prendre la fuite jusqu'au parking, et ne se fera rattraper par les deux comparses (dont Tanaka, toujours aussi nu) qu'alors qu'elle se bat avec ses clés de voiture.

Pour ma part, je trouve la suite de l'émission des plus fascinantes : ramenée à la raison, l'idol finit par accepter la présence de cet homme nu, et s'attèle à son dessin avec une application exemplaire – allant même jusqu'à discuter tout naturellement avec Tanaka, venu se placer derrière elle pour admirer l'oeuvre en cours.
(au passage, pour ceux qui s'inquièteraient de la sauvegarde des bonnes moeurs, qu'ils n'aient crainte, une élégante vignette orange masque à tout instant l'anatomie de notre ami naturiste, ouf !)

Mais revenons plutôt à Lundi dernier, où le sixième (et ultime) dessin devait être réalisé. Comme il s'agit de finir en beauté (si j'ose dire), et qu'après tant de cris les demoiselles ont fini par savoir ce qui les attend, les producteurs de l'émission ont eu une nouvelle idée. Et voici l'ami Tanaka qui se voit obligé d'annoncer aux trois (trois !) idols recrutées pour l'occasion qu'il ne va pas s'agit de faire du dessin cette fois-ci, mais ... du body-painting !

Bien embêté, d'ailleurs, le sieur Tanaka ... qui va donc user de chemins détournés pour présenter la chose. Il commence par proposer aux demoiselles une petite collation, cède à leur demande de se couvrir un peu pour ne pas gêner leur appétit, discute de choses et d'autres, et va même jusqu'à jouer aux cartes. A ce moment-là, l'atmosphère est plutôt détendue, comme on peut en juger en voyant la posture de Tanaka – la posture typique du mâle assis sur un canapé, les cuisses à angle droit, histoire de se sentir le plus à l'aise possible. Et lorsque l'on en vient enfin à parler de body-painting, ces demoiselles sont plus qu'enthousiastes, et acceptent aussitôt de se mettre au travail.

Et curieusement, ce soir-là, les rôles vont être inversés, et c'est Tanaka lui-même qui va se retrouver le plus gêné. Malmené par les trois filles (« tiens-toi droit », « arrête de bouger », « ne rigole pas ») qui sont en train de le recouvrir de peinture, on le sent vaguement inquiet de perdre le contrôle de la situation. Ceci deviendra flagrant lorsque, après un premier essai raté (« non, c'est mauvais, va prendre une douche, et on recommence »), on l'entendra bougonner dans la solitude de la salle de bain : « mais où les ont-ils trouvées, celles-là ? ».

Retour dans l'atelier, les choses deviennent sérieuses, on n'est plus là pour rigoler. Autour de Tanaka qui décidément ne sait plus trop ce qui lui arrive, les demoiselles discutent composition, décident de passer un fond blanc pour servir de base, placent les premiers éléments de leur oeuvre. On passe à la réalisation, le pauvre Tanaka se fait encore rappeler à l'ordre (« ne bouge pas, idiot ») alors qu'on est en train de lui blanchir le postérieur (je vous épargne les détails, même si la caméra s'y est pas mal attardée), et a encore droit à des remontrances quand, une heure plus tard, il ose manifester alors que les trois miss s'attachent à faire sécher la peinture, armées de sèche-cheveux.

Surprise, le résultat n'est pas franchement hideux si l'on n'a rien contre les peintres naïfs, et Tanaka a plutôt fière allure, un Père Noël sur la poitrine, l'arrière-train d'un renne sur les fesses, et les bras enguirlandés de houx. De l'art, je vous dis.

Alors voilà, le calendrier est fini, il va sans doute falloir trouver une nouvelle idée (farfelue) pour la prochaine série d'émissions. Mais pour cela, aucune inquiétude, je leur fais confiance ...